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ArteHistoire

Le Mythe de Prométhée et Pandore

8 Novembre 2013 , Rédigé par Célimène et Pauline Publié dans #Histoire des religions, #Mythologie

Nicolas-Sébastien Adam - 1762
, Paris, musée du Louvre

Nicolas-Sébastien Adam - 1762
, Paris, musée du Louvre

John William Waterhouse, « Psyche opening the golden box », 1903

John William Waterhouse, « Psyche opening the golden box », 1903

Le Mythe de Prométhée

Introduction

Le mythe de Prométhée a traversé les époques et de nombreuses interprétations et versions se sont constituées. En effet, ce mythe est lié à de nombreuses traditions qui proviennent de diverses époques et de nombreux auteurs, ce qui peut rendre le mythe assez confus et parfois même contradictoire.

Ce récit n’est pas mentionné chez Homère, mais est clairement expliqué dans la Théogonie d’Hésiode, qui sera le premier des poètes grecs à raconter le mythe de Prométhée. Nous mentionnerons néanmoins d’autres versions de ce mythe au cours de notre analyse.

Le mythe de Prométhée est associé à celui de la création de l’homme, de sa condition, ainsi qu’à l’apparition de la culture. Ainsi, il est souvent considéré comme l’ami de l’homme. Son nom, « Prometheus » en grec, signifie « celui qui pense avant ». Ce don de prédiction lui a permis d’esquiver bien des problèmes, notamment lors de la Titanomachie où il se rangera aux côtés de Zeus. Il est aussi intéressant de voir que ce mythe à beaucoup de points communs avec la Bible.

Le mythe de Prométhée et la condition humaine

Selon Hésiode, Prométhée est le fils du Titan Japet et de la Nymphe Clyméné. Eschyle, auteur grec né aux environs de 526 av. J.-C., associe une différente parenté à Prométhée et écrit que sa mère serait la titanide Thémis. Il serait le cousin de Zeus et ferait donc partie de la deuxième génération des Titans.

Paul Diel, dans son livre, Le symbolisme dans la mythologie grecque, annonce : « Le créateur Prométhée n’est pas une divinité, il est un Titan. Comme tel, il symbolise la révolte contre l’esprit (Zeus) »[1]. Prométhée serait donc « destiné » à s’opposer à Zeus, le dieu ultime de la création, comme nous le verrons dans la suite du récit et de l’analyse.

Prométhée a trois frères. Le premier, Atlas, est condamné à porter le monde sur ses épaules comme nous le décrit Hérodote. Ménoetios, surnommé « l’insolent » est foudroyé par Zeus et envoyé dans le Tartare et Epiméthée, en grec « Epimetheus », qui signifie « celui qui réfléchit après ». Il est également surnommé « le maladroit », car il sera à l’origine du malheur des hommes. Epiméthée est considéré comme l’opposé de Prométhée.

On attribue aussi à Prométhée un fils, nommé Deucalion, comparable à Moïse dans la Bible, car il sauve l’espèce humaine du déluge provoqué par Zeus qui aurait voulu faire « disparaître la race de bronze »[2].

[1] Page 287

[2] Ibid. 7,2.

Le Mythe de Prométhée et Pandore
a) La première faute

Selon Hésiode, le mythe de Prométhée commence lorsqu’il est appelé pour être l’arbitre d’un conflit, entre les hommes et les dieux, qui se déroule à Mécôné (Mécôné serait l’ancien nom de la ville de Sycione) à propos du sacrifice d’un taureau, car personne n’arrive à se mettre d’accord sur la part consacrée aux dieux et celle qui revient aux hommes. Il est à noter que selon d’autres versions, Prométhée est convié à un repas entre les hommes et les dieux et c’est au court de ce repas, que Prométhée découpe en deux parties, un bœuf. Prométhée commet alors sa première faute. Voulant tromper Zeus, il découpe un bœuf en deux parties. Dans la première partie, il cache sous la graisse blanche, c’est-à-dire la partie la plus alléchante, des os, qui sont la moins bonne part de l’animal. Dans la seconde part, il cache la bonne viande, sous une couche d’entrailles et de chair non comestible : « En ce jour-là Prométhée avait, d’un cœur empressé, partagé un bœuf énorme, qu’il avait placé devant tous. Il cherchait à tromper la pensée de Zeus : pour l’une des deux parties, il avait mis sous la peau chair et entrailles lourdes de graisse, puis recouvert le tout du ventre du bœuf ; pour l’autre, il avait, par une ruse perfide, disposé en un tas les os nus de la bête, puis recouvert le tout de graisse blanche. »[1].

Selon Hésiode, Zeus comprend le subterfuge, mais pour pouvoir mieux punir Prométhée de son audace, il décide de choisir la mauvaise part, c’est-à-dire la part cachant les os : « …et Zeus comprit la ruse et sut la reconnaître. Mais déjà, dans son cœur, il méditait la ruine des mortels, tout comme en fait il devait l’achever. De ses deux mains il souleva la graisse blanche, et la colère emplit son âme, tandis que la bile montait à son cœur, à la vue des os nus de la bête, trahissant la ruse perfide. »[2].

Après avoir enlevé la graisse blanche et découvert les os, Zeus entre dans une colère noire et retire le feu aux hommes. Ici, le sacrifice symbolise la séparation entre les hommes et les dieux, car ils mangent des choses différentes. À la base, Prométhée veut tromper les dieux, mais c’est finalement lui qu’il condamne et particulièrement les hommes. En choisissant les os et en donnant la viande aux hommes, Zeus positionne les êtres humains de manière inférieure. En effet, la chair du bœuf représente la partie éphémère de l’animal, soit la mortalité tandis que les os représentent, par leur dureté, l’immortalité. Face aux dieux immortels, les hommes donc sont eux, mortels.

Ce passage explique clairement pourquoi les os et la graisse de l’animal sont donnés aux dieux, tandis que les êtres humains mangent la viande : « Et aussi est-ce bien (sic) pourquoi, sur la terre, les fils des hommes brûlent aux Immortels les os nus des victimes sur les autels odorants. »[3]. Ce mythe explique aussi le but des sacrifices. Il s’agit d’un moyen de communication entre les hommes et les dieux, même si au départ, ils n’étaient pas séparés. Le mythe de Prométhée explique comment s’est produite cette séparation et pourquoi les hommes ne peuvent communiquer avec les dieux qu’à travers le sacrifice, en faisant passer un être du monde profane, au monde sacré.

Dans la version d’Apollodore, Prométhée s’ennuie et décide avec Athéna de créer l’homme avec de l’argile et de l’eau et d’en réalisé un être comparable aux dieux. Athéna lui insuffle la vie et Prométhée grâce au feu, dérobé aux dieux, lui enseigne toutes les connaissances qui permettront un pas vers la civilisation. La culture commence à prendre naissance, ainsi que l’apparition d’habitation, le travail de certains matériaux comme le métal ou plus tard encore l’écriture. « Pausanias, dans le livre X de sa Description de la Grèce, affirme que l'on pouvait encore voir, à son époque, devant une chapelle de Panopée dédiée à Prométhée, un peu de l'argile qui servit à façonner le premier humain. »[4]. C’est donc grâce à ce feu que Prométhée est considéré comme le créateur de l’homme : « Et Prométhée, ayant façonné les hommes à partir d'eau et de terre, leur donna aussi le feu, après l'avoir caché à l'insu de Zeus dans une férule ».[5]

Le feu est un élément très important dans ce mythe. L’homme peut désormais cuire la viande, qu’il ne peut pas consommer crue. A partir de ce moment, il se sépare des animaux et se civilise. Le feu symbolise, tout comme Prométhée, l’intelligence. C'est aussi un élément essentiel dans le cadre des sacrifices (que l’on appelle communément la « cuisine sacrificielle »), pour entrer en relation avec les dieux, car les aliments, plus particulièrement la graisse et les os, sont cuits sur un autel, lors de la pratique rituelle.

[1] Hésiode, La Théogonie, l. 534-542

[2] Hésiode, La Théogonie, l. 550 – 556

[3]Hésiode, La Théogonie, l. 556 – 558

[4] http://www.kulturica.com/promethee.htm

[5] Apollodore, Bibliothèque, I, 7, 1-2

Le Mythe de Prométhée et Pandore
a) La seconde faute

Prométhée accomplit alors sa seconde faute : il se rend secrètement, selon certains avec l’aide d’Athéna, selon Hésiode seul, sur l’Olympe et dérobe le feu aux dieux en le capturant au creux d’un roseau ou d’une tige de fenouil, pour le rendre aux hommes : « Mais le brave fils de Japet sut le tromper et déroba, au creux d’une férule, l’éclatante lueur du feu infatigable ; et Zeus, qui gronde dans les nues, fut mordu profondément au cœur et s’irrita en son âme, quand il vit briller au milieu des hommes l’éclatante lueur du feu. »[1].

Dans son ouvrage La psychanalyse du feu, Gaston Bachelard explique que le feu est un élément à double tranchant, que l’on peut retrouver dans le mythe de Prométhée. Le feu est un élément positif quand il intervient dans le début de la civilisation. Cependant, le feu est aussi un élément destructeur. Ici, le feu est plutôt représenté sous sa forme négative, car le feu volé n’est plus un don de Zeus.

Nous retrouvons un lien avec la Bible, car le feu est non seulement l’emblème du diable (« les flammes de l’enfer »), mais possède aussi un attribut purificateur. Il lave, car il supprime.

[1] Hésiode, La Théogonie, l. 564 – 569

La création de Pandore et le rôle de la première femme

Le Mythe de Prométhée et Pandore

Nous allons poursuivre l’histoire du mythe de Prométhée en racontant la création de la figure de Pandore, la première femme. Après avoir présenté et commenté le mythe, nous enchaînerons avec une étude de différents auteurs sur ce personnage. De nombreuses interprétations se sont constituées à travers les époques et nous en illustrerons quelques unes dans notre analyse.

La figure de Pandore est créée sur l’ordre de Zeus, comme un objet de vengeance contre les êtres humains. Mais en tant que femme, elle vient également avec la mission essentielle de perpétuer le genre humain. « …il commande à l’illustre Héphaistos de tremper d’eau un peu de terre sans tarder, d’y mettre la voix et les forces d’un être humain et d’en former, à l’image des déesses immortelles, un beau corps aimable de vierge (…) Aphrodite, d’or sur son front répandra la grâce, le douloureux désir, les soucis qui brisent les membres, tandis qu’un esprit impudent, un cœur artificieux seront, sur l’ordre de Zeus, mis en elle par Hermès. »[1]. Pandore est créée dans le but d’une vengeance. Sa création est un paradoxe, car d’une part, elle existe dans le but d’apporter les malheurs et la souffrance, mais elle est en même temps la seule capable de perpétuer l’humanité de part son rôle de femme et de mère. Elle est créée avec tous les attributs de la beauté et de la séduction, mais en même temps avec le visage de l’innocence qui lui donne le pouvoir d’aveugler l’homme sans qu’il n’ait aucune méfiance. Tous les mots pour la décrire insistent sur son apparence. Les termes tels que « beau corps », « colliers d’or » et « beaux cheveux…en guirlande de fleurs printanières » contrastent avec les notions d’ « impudent », de « cœur artificieux », de « mensonges », et de « trompeurs » qui caractérise un fond néfaste. Pandore est véritablement décrite comme un piège. Sa beauté attire et masque ses vices. Il y a donc un fort contraste entre la description intérieure et extérieure.

« Puis, héraut des dieux, il met en elle la parole et à cette femme il donne le nom de Pandore, parce que ce sont tous les habitants de l’Olympe qui, avec ce présent, font présent du malheur aux hommes qui mangent le pain. »[2]. La figure de Pandore est donc soumise à une destinée du mal puisque c’est inscrit dans sa nature, par la volonté de Zeus.

« Epiméthée ne songe point à ce que lui a dit Prométhée : que jamais il n’accepte un présent de Zeus Olympien »[3]. Il est intéressant de relever que « Epiméthée » signifie « pense après », que « Prométhée » signifie « pense avant » et de rappeler que « Pandore » signifie « don de tout », ce qui englobe à la fois le bien et le mal. Nous constatons que l’étymologie des noms donne des indications sur le déroulement du mythe.

« La race humaine vivait auparavant sur la terre à l’écart et à l’abri des peines, de la dure fatigue, des maladies douloureuses, qui apportent le trépas aux hommes. Mais la femme, enlevant de ses mains le large couvercle de la jarre, les dispersa par le monde et prépara aux hommes de tristes soucis. »[4]. Nous observons que Pandore est comme soumise à des forces qu’elle ne peut maîtriser et elle doit ouvrir cette boîte. Elle est décrite comme une femme à la fois d’instinct qui ne peut maîtriser ses pulsions, mais en même temps, c’est comme si elle était soumise à une force beaucoup plus puissante qui est le poids de sa destinée. Elle est donc soumise à une double contrainte, l’une interne et l’autre externe. On retrouvera le mythe de Pandore dans le récit d’Adam et Eve sur lequel nous reviendrons dans la suite de notre analyse.

La notion de destinée joue un rôle majeur dans ce récit : « Seul, l’Espoir restait là, à l’intérieur de son infrangible prison, sans passer les lèvres de la jarre… »[5]. En refermant le couvercle trop vite, elle laisse l’espoir emprisonné dans la jarre. Au premier abord, il semble être un remède pour apaiser tous les maux dispersés dans la vie des hommes, car il symboliserait une chance de s’en sortir. Mais finalement, nous pouvons considérer cet espoir plutôt comme quelque chose de néfaste car il ne serait qu’un leurre supplémentaire. Il donnerait aux hommes l’illusion d’une échappatoire possible, alors que leur destin est irrévocable. D’ailleurs, cela est souligné par la volonté de Zeus et la citation « Son piège ainsi creusé, aux bords abrupts et sans issue. »[6]. En agissant ainsi, le geste de Pandore semble la rendre responsable d’une nouvelle souffrance, mais finalement il s’agit d’un geste créateur, car il va obliger l’homme à faire face à son destin implacable en toute lucidité et en toute conscience, sans la facilité d’une échappatoire possible qui serait l’espérance. La grandeur humaine serait sa capacité à affronter cette destinée. Par son geste, Pandore nous a évité une vie univoque : « sinon sans efforts, tu travaillerais un jour, pour récolter de quoi vivre toute une année sans rien faire »[7]. Il s’agirait d’un monde de facilité où la notion de progrès n’interviendrait pas puisque tout ne serait que bonheur, beauté et harmonie. En amenant le mal, elle donne au monde sa consistance, sa dualité, car de même que la lumière ne peut exister sans l’ombre, le bien ne peut exister sans le mal. L’homme a désormais le choix et à travers cela, il pourra faire la conquête de sa liberté.

Le récit biblique d’Adam et Eve reprend des éléments du mythe de Pandore. En effet, rappelons que selon ce récit, Eve aurait mis fin à la vie paradisiaque de par sa curiosité qui l’entraîne à cueillir et à manger la pomme défendue du Jardin d’Eden. Nous voyons ici que la curiosité est présentée sous un angle négatif, puisqu’elle est assimilée à une impulsion plus forte que la raison et sans soucis des conséquences, alors que nous pouvons aussi voir la curiosité sous un jour positif, si on la considère comme une soif de connaissance. Nous voyons notamment que dans le domaine de la science, la curiosité est présentée sous un jour favorable et qu’elle devient un moteur de progrès. Mais ici, la connaissance est liée au mal. En effet, en désobéissant à la loi divine, par curiosité et par orgueil, la race humaine s’éloigne des dieux et met fin à sa vie paradisiaque. Avec l’irruption du mal, apparaît la dualité sur Terre. Désormais, il n’existe plus seulement le Bien, le bonheur et l’harmonie, mais il y a l’apparition du Mal et de la souffrance. Ce mythe pose le problème crucial : pourquoi les dieux ont-ils permis l’existence du Mal sur Terre ? Cette souffrance et ce destin provoque la révolte de l’homme.

[1] p.88 HESIODE, Les travaux et les jours, 42-106 trad. Mazon (CUF), les Belles Lettres, Paris, 1996

[2] p.89

[3] p.89

[4] p.89

[5] p.89

[6] p.89

[7] p.87

Le Mythe de Prométhée et Pandore

La figure de Pandore sera reprise par plusieurs auteurs à travers les époques et chaque fois avec un éclairage différent.

Prenons Goethe, qui se situe à la fin du 18e et au début du 19e siècle. Il propose une vision très différente de celle du mythe d’Hésiode. Selon lui, Pandore ne représente pas la source de tous les maux mais l’apparition d’un Idéal. Dans l’ouvrage de Jacqueline Duchemin, il est dit que : « Pour Goethe (…) l’éternel féminin, loin d’être une source de perdition comme le veut la tradition chrétienne, est un principe essentiellement bienfaisant ; la Femme n’a pas été envoyée aux hommes pour leur perte, comme le contait le récit d’Hésiode, mais pour leur salut. »[1]. Goethe met donc au premier plan son rôle de mère grâce auquel elle va perpétuer l’humanité.

Ce mythe reste toujours d’actualité puisque dans un article consacré au professeur universitaire François Rachline en octobre 2011, ce dernier nous donne un autre regard sur Eve – qui, nous le rappelons peut être associée à Pandore – et affirme que : « Sans Eve et la pomme, l’être humain ne serait jamais entré dans la grande aventure de la connaissance ». Il condamne la vision traditionnelle qui fait d’elle la responsable de tous les malheurs sur Terre. Au contraire, il présente sa curiosité comme le moyen pour l’homme de sortir de son ignorance. Elle permet à l’humanité de progresser.

Enfin, d’après l’auteur Jean Rudhardt, Hésiode ne cherche pas à raconter la création de la première femme, car la féminité existe déjà chez les déesses et les animaux. Pandore servirait plutôt à faire entrer l’humanité dans un monde civilisé. C’est elle qui marque le début de la civilisation. Nous remarquons que l’auteur valorise son rôle dans la société. Elle acquiert un statut, celui d’épouse. Pandore est à la fois décrite comme faible et ne sachant résister à ses pulsions, mais aussi comme une épouse qui assure l’économie domestique. Elle est présentée à la fois comme un bien fait et un fléau et incarne donc la dualité. De plus, grâce à elle le bien et le mal s’équilibrent.

[1] p.126

Le Mythe de Prométhée et Pandore

Le châtiment de Prométhée et sa délivrance

Pour avoir donné le feu aux hommes, Prométhée est condamné à être enchaîné au sommet du Mont Caucase (Hésiode mentionne une simple colonne). Selon Apollodore et Eschyle, c’est Héphaïstos, dieu forgeron et du feu, lui-même qui l’enchaîne et selon Hésiode, il s’agit de Zeus. Tous les jours, un aigle mange son foie qui se reforme durant la nuit. Le mythe de Prométhée nous amène à penser que les Grecs anciens avaient découvert que cet organe est l'un des rares à se reconstituer naturellement en cas de blessure.

Le Mythe de Prométhée et Pandore

Un jour, Héraclès libère Prométhée en tuant l’aigle d’une flèche : « Voilà ce que tu as gagné en jouant le bienfaiteur des hommes. Dieu que n’effraie pas le courroux des dieux, tu as, en livrant leurs honneurs aux hommes, transgressé le droit : en récompense, tu vas sur ce rocher monter une garde douloureuse ... »[1]. Symboliquement parlant, Héraclès qui représente la force, sauve Prométhée, l’intelligence.

Zeus ne s’y oppose pas, car c’est son fils, Héraclès qui commet un nouvel exploit en libérant Prométhée. Dans La Théogonie, Zeus a juré sur le Styx, que Prométhée sera enchaîné à jamais sur le Mont Caucase. Le problème est que les dieux qui ne tiennent pas leur promesse sont punis. Mais Zeus trouve une solution grâce à Métis (l’intelligence) : Il oblige Prométhée à porter une bague faite avec une pierre qui provient du Caucase et un bout de sa chaîne. Symboliquement, Prométhée est donc toujours lié au Mont Caucase.

[1] Eschyle, Prométhée enchaîné, vers 28-31

D’après les écrits d’Apollodore, l’histoire continue. Parallèlement à cela, le centaure Chiron souffre d’une blessure incurable que lui aurait faite Héraclès par erreur en le touchant au genou avec sa flèche alors qu’il chassait le sanglier d’Erymanthe. Flèche, qui rappelons-le était trempée dans le sang de l’Hydre de Lerne et c’est pour cette raison que la blessure de Chiron est incurable. Malheureusement pour lui, Chiron est immortel. Il est donc condamné à souffrir éternellement de cette blessure. Il décide donc d’échanger son immortalité contre la mortalité de Prométhée (bien qu’il soit un Titan). Zeus accepte et c’est pour cela que Prométhée est un Titan immortel. Pour le remercier de l’avoir libéré, Prométhée indique à Héraclès où se trouvent les pommes d’or du jardin des Hespérides.

Prométhée et la Bible

Il est intéressant de rappeler que le mythe de Prométhée ressemble beaucoup à certains épisodes de la Bible, dans le monde Chrétien et/ou plus particulièrement, au récit biblique d’Adam et Eve.

  1. Le père de Prométhée, Japet ressemble étrangement au nom Japhet, un des fils de Noé.
  2. Prométhée, redescend du ciel avec le feu dérobé, tel Jésus, sauvant l’humanité.
  3. Le feu de l’Olympe (« Le feu céleste ») représenterait la « connaissance divine ».
  4. L’épisode où Prométhée est enchaîné au somment du Mont Caucase ressemble à celui où Jésus est crucifié.
  5. Prométhée peut aussi être comparable à un ange, qui apporte la lucidité aux êtres humains.
  6. Dans le récit adamique, Pandore peut être identifié à Eve qui touchera au fruit interdit, comme Pandore ouvrira la boîte et Epiméthée à Adam.
  7. Le fait que depuis l’événement d’Adam et Eve, l’homme est voué à s’opposer à Dieu/aux dieux.

Conclusion

Le mythe de Prométhée est un mythe fondateur d’une grande importance, ce qui explique les nombreuses versions existantes. Il explique de quelle manière l’homme entre dans la civilisation. D’une part avec le feu qui va lui permettre de réaliser de grands progrès et d’autre part avec la création de la femme en tant qu’épouse. Grâce à cela, l’homme s’éloigne de l’animalité et entre dans la culture, c’est-à-dire une société avec des règles et des lois et non plus régie par l’instinct. Ce mythe explique également la rivalité entre les dieux et les hommes. En effet, à cause de sa désobéissance, l’homme va attirer la colère des dieux et va être puni par l’intermédiaire de Pandore.

Ce mythe aurait été influencé par les légendes du Proche-Orient, mais c’est véritablement les textes d’Hésiode et d’Eschyle qui permettent sa diffusion dans la Grèce ainsi qu’à travers les époques. Il sera repris dans la littérature, notamment par Goethe mais intéressera également de nombreux autres auteurs. Le mythe de Prométhée est « …l’un de ceux qui ont servi à exprimer les incertitudes et les angoisses de l’esprit devant les problèmes insolubles de la vie et de la destinée, plus particulièrement devant le problème du mal… »[2].

[2] p.19, Prométhée, Jacqueline Duchemin, Paris les Belles Lettres, 2000

Bibliographie

Ouvrages et sites internet utilisés pour le mythe de Prométhée :
  • APOLLODORUS, Bibliothèque, traduction et commentaires de Jean-Claude CARRIERE et Bertrand MASSONIE, Paris, Les Belles Lettres, 1991
  • Paul DIEL, Le symbolisme dans la mythologie grecque, éd. Payot et Rivages, Paris, 2002
  • HESIODE, Théogonie, traduction et commentaires de Paul MAZON, Paris, Les Belles Lettres, 1996
  • Gaston BACHELARD, La psychanalyse du feu, éd. Gallimard, « Folio Essais », 1985.
  • ESCHYLE, Prométhée enchaîné

1. http://dinoutoo.pagesperso-orange.fr/mythogie/repp/promethee.htm[1]

2. * http://mythologica.fr/grec/promethee.htm (page 1 et 2)

3. http://www.philolog.fr/le-mythe-de-promethee

4. http://elearning.unifr.ch/antiquitas/fiches.php?id_fiche=13

Image 2: http://antikforever.com/Grece/Divers/argos_corinthe.htm

Image 3: Prométhée apportant le feu aux hommes, Heinrich Füger, 1817, 221X156 cm,

Liechtenstein Museum, Wien.

Image 4: Jules Joseph Lefebvre, Pandore, 1882

Image 5: John William Waterhouse, Pandore, 1896.

Image 6: Theodoor Rombouts, Prométhée, Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique

Image 7: Tableau de Christian GRIEPENKERL, Heraclès sauve Prométhée.

Ouvrages et article utilisés pour la figure de Pandore :

  • Véronique CHÂTEL et Jean-Christophe AESCHLIMANN, Adam, la pomme, Eve et nous, Coopération numéro 42, 18 octobre 2011
  • Jacqueline DUCHEMIN, Prométhée, histoire du mythe, de ses origines orientales à ses incarnations modernes, Paris, 2000
  • Edith HAMILTON, La mythologie, coll. Marabout université, édition marabout, Verviers, 1978
  • HESIODE, Les travaux et les jours, 42-106 trad. MAZON (CUF), Les Belles Lettres, Paris, 1996
  • Guus HOUTZAGER, L’univers de la mythologie grecque, trad. Jean-Louis HOUDEBINE, éditions Gründ, Paris, 2004
  • Jean RUDHARDT, Les dieux, le féminin, le pouvoir, Labor et Fides, Genève, 2006
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